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Strada Doamnei 17, BucureΘ™ti 030167, Roumanie

Entre la troisième et future quatrième vague d’une pandémie mondiale, entre deux orages d’un été pluvieux et triste, et aux prémices d’un Paléo 2021 qui n’aura jamais lieu, j’ai craqué. En terme de craquage, ça se finit souvent comme ça. A coup de rêverie sur une carte, à lister les pays où je n’ai pas encore foulé le sol, pour finir par jeter mon dévolu sur un endroit improbable, ou presque : la Roumanie.

J’ai réservé les billets d’avion trois jours plus tôt. Les voyages à l’arrache (arrache toute relative) seront définitivement la thématique de l’année. Pour l’organisatrice pathologique que je suis, ça suffit à me perturber. Cependanf, je ne suis pas le moins du monde stressée en préparant ma petite valise en ce lundi 19 juillet.

Avec Aurélien, nous arrivons à l’aéroport vers 18h00. J’ai plus souvent eu des vols en début de journée qu’en fin. Nous grignotons une morce, passons la sécurité déserte et profitons de boire une (ou deux) bière de l’autre côté. C’est sûr que c’est toujours plus classe à 19h00 qu’à 6h00. Trois vols sont encore affichés au tableau des départs. Deux pour le Portugal et un pour Bucharest. Des destinations diamétralement opposées.

Alors que les sources abreuvantes se ferment les unes après les autres, notre avion est repoussé, et nous sommes les derniers, ou presque, à errer devant le guichet du C91.

C’est le moment de parler de la compagnie… W!ZZ, sans déconner ? Je n’en avais jamais entendu parlé avant de réserver nos billets. L’avion est à l’origine prévu pour 21h15, décollage compris. Le géant metallique, décoré d’un étrange mélange de blanc, rose et violet, quitte le tarmac à 22h05. Mon empreinte carbone s’élève en même temps, une fois de plus, faisant grimacer les écolos de bas étages. A l’horizon s’étend une bande colorée se dégradant du bleu clair, au rouge-orangé tandis que le soleil a rendu les armes depuis longtemps. Au dessous de nous, les lumières laissent deviner les villes, comme des milliers d’étoiles dispersées dans la nuit. Je pourrais rester des heures à regarder ce spectacle des temps modernes.

L’avion atterrit 2h15 plus tard sur les terres roumaines. Le signal lumineux concernant les ceintures, s’est éteint et rallumé, hésitant tout le long du vol, tandis que l’appareil tremblait comme une fourchette tenue par un parkinsonien

Il y a une heure de décalage, ce qui signifie qu’il est passé 2h du matin. A cette heure-là, il faut oublier les bus et trains potentiels. Ne reste alors que l’option du taxi, et je crois que j’ai horreur de ça. Il n’y en a pas un qui nous saute dessus avec un ton insistant et agressif afin de monter dans son véhicule. C’est louche. Nous engageons les négociations avec un homme d’une nonchalance à faire frémir un paresseux. Le type nous demande 150 Lei roumain… bon déjà, petit stop sur la monnaie locale. Un leu, des lei... J’adore ! 150 équivaut à 33 CHF, ce qui est bien trop cher. Nous rebroussons chemin dans l’aéroport et trouvons des bornes à taxi officielles avec une garantie de prix correct. 12 minutes d’attente, la promesse d’un tarif à 1,99 LEI/Km, le numéro 3342, et l’adresse mail pour toutes les réclamations/insultes/menaces. Nous voilà bien avancés. J’ai l’impression d’être à un loto, en attendant que le bon numéro sorte à chaque taxi passant devant nous. Carton ! Le 3342 déboule devant nous.

Notre hôtel se trouve à environ 20 minutes de route pour 18km. J’ai l’impression que le véhicule file vite dans la nuit, ce qui est rapidement confirmé par les panneaux qui indiquent 70km/h contre 120km/h sur le compteur du taxi. Visiblement les panneaux décorent plus qu’ils ne sont utiles. Je devrais peut-être dire au mec qui nous conduit que tous ses crucifix qui pendent aux quatre coins de sa voiture seront moins efficaces que de respecter les limitations de vitesse et d’accessoirement attacher sa ceinture. Je passerais probablement pour la rabat-joie. La course, et c’est le bon mot, nous coûte 38 LEI, ce qui correspond à 8 CHF. J’arrondis l’addition à 50 LEI, bien que ça soit peu mérité. Nous avons quand même la chance de n’avoir pas pris le premier taxi qui était littéralement trois fois plus cher.

L’hôtel, le Moxy Bucharest Old Town, est plutôt chouette et bien décoré, je suis contente de mon choix. Nous constatons rapidement que le port du masque est obligatoire sur le papier et plus qu’optionnel en pratique.

Je sais que nous nous trouvons au cœur de la vieille ville, mais il est difficile de se faire des repères actuellement. C’est en ça que j’aime tant les transports en communs. Ça me permet de comprendre le fonctionnement de la ville et de faire activer mon sens de l’orientation. Tant pis pour cette fois, ça sera un nouveau challenge.

Difficile de croire que nous nous trouvons entre lundi et mardi en milieu de nuit. La petite terrasse de l’hôtel est presque pleine. Nous posons nos affaires et venons savourer notre première bière roumaine. Nous nous couchons finalement à 4h15.

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Bucarest

La sonnerie résonne dans le vide un nombre incalculable de fois. Le bouton « rappel » devient mon favori. Est-ce vraiment étonnant ? Non. Pas en allant se coucher à 4h30, et encore moins en ayant cumulé des heures de sommeil en négatif depuis des semaines, voir des mois. Enfin bref, nous nous extirpons du lit après 10h00. C’est avec l’énergie d’une limace un jour d’été que nous quittons l’hôtel.

Nous nous trouvons au cœur de la ville, ce qui est un avantage non négligeable. En quelques rues, nous joignons le métro. 10 trajets pour 20 LEI soit 4,40 CHF. C’est aussi glauque et sans charme qu’on aurait pu s’y attendre.

Nous atterrissons aux abords du lac Herastrau qui se situe dans le parc du même nom. Ici se trouve un Arc de Triomphe, superposable ou presque à celui de Paris, qui a été inauguré en 1936.

Nous repérons des trottinettes électriques et sautons sur l’occasion. Je file à 25km/h (la folie), les cheveux au vent et le sourire aux lèvres. Je crois que les roumains sont encore plus patriotiques que les suisses, au vu des mille et un drapeaux bleu, jaune, rouge qui flottent au bord de la route. Au milieu du parc, sur la partie est, se trouve une enclave avec une boîte de nuit et quelques restaurants dont… le HardRock Café ! C’est assez étrange de le trouver ici.

Le HardRock Café de Bucharest est grand et de plein pied. Il est tout juste midi et nous sommes les premiers clients. Nous profitons de boire une bière locale, sans goût particulier, accompagné d’un burger digne de l’endroit. Pour le « summer body », on repassera. Le tout accompagné d’un son rock craché par les hauts-parleurs, le rêve. Un tour par la boutique, un porte-monnaie plus léger et nous voilà comblés.

Dans le parc Herastrau se trouve un des plus grands musées en plein air de Bucarest. Il contient le folklore des villages traditionnels d’antan. C’est le même genre de musée qui existe à Ballenberg en Suisse ou à Tallinn en Estonie. J’aime beaucoup. C’est une jolie parenthèse au cœur de la ville. Je suis assez déçue, car il n’est pas possible de voir l’intérieur des petites bicoques, alors que c’est souvent ce qu’il y a de plus intéressant. Il fait 30°, et le soleil joue à cache-cache avec les nuages, ce qui nous offre un peu de répit entre deux rayons brûlants. Je me décompose au fur et à mesure. Le post-prandial est plus violent que prévu, combiné au manque de sommeil, c’est un cocktail mortel. Je serais presque capable de dormir debout. Nous faisons encore un tour de l’immense parc et rebroussons chemin en direction de l’hôtel pour une sieste bien méritée.

Nous ressortons, en meilleur forme, à 17h30. J’emmène Aurélien dans un bar immense en extérieur qui se trouve dans un parc avec pleins d’endroits où se poser, comme des hamacs, et des cocktails à n’en plus finir. Enfin ça, c’était la théorie. En réalité, nous découvrons que l’endroit est fermé depuis plusieurs mois, et que le parc en question est clôturé avec des vieilles planches en taules rouillées. Échec. La déception est grande. Nous nous rabattons sur une terrasse sur le trottoire qui ne fait pas rêver plus que ça. En revanches, la bière locale est bien meilleure que celle goûtée au HardRock.

Nous enfourchons à nouveau les trottinettes électriques et parcourons la Calea Victoriei de tout son long grâce à la piste cyclable. Aurélien part devant et je ne suis pas. J’ai la tête ailleurs et le regard qui oscille de part et d’autre de la rue à la cime des bâtiments. C’est intéressant. Dire que Bucharest est joli serait mentir, mais j’aime observer les tours de bétons qui m’entourent. Il y a beaucoup d’immeubles et d’endroits abandonnés. La propreté laisse clairement à désirer et les graffitis sont le maître mot.

Nous atterrissons dans la vieille ville, tout proche de notre hôtel. Il y a pleins de restaurants, bars, boites de nuit et bars à strip-tease. Au sol se trouve des pavés, éléments typiques d’un centre historique. Nous montons au Nomad Skybar, un bar rooftop aux allures vintage. L’endroit est sympa et les mojitos sont bons. J’ai l’impression d’être complètement décalé, car nous nous déplaçons pour manger à 21h passées. Nous recommandons des Mojito, et quelques trucs à grignoter, car la carte ne nous inspire pas vraiment.

Nous avons une longue journée demain, et à 00h00 nous partons…. Enfin ça, c’était la théorique…. jusqu’à ce que nous croisons une ruelle (Intrarea Nicolae Selari) qui fait moins d’1m60 de large et où l’ambiance est incroyable. Malgré que nous connaissons qu’une musique sur dix, nous nous déhanchons sur cette scène improvisée, coincée entre deux bars, les décibels à fond. Nous nous faisons violence pour rentrer, alors que l’horloge indique bientôt 3h00. Je sombre rapidement dans les bras de Morphée.

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Transylvanie

Le réveil est comme prévu : dur, violent, barbare, douloureux et je pourrais poursuivre la liste de synonyme encore longtemps. Il est 7h00. Dehors, le soleil brille comme si nous étions le milieu de la journée, et ça en est presque agaçant. Nous nous habillons et je tente tant bien que mal de ressembler à quelque chose. Tant pis, les lunettes de soleil masqueront le plus pire.

Nous rejoignons une petite camionnette composée de huit joyeux passagers et un guide. Je n’ai jamais été particulièrement fane des tours organisés sur le principe. En revanches, c’est une mine d’information infinie et ça évite de perdre beaucoup de temps. Heureusement, nous sommes en petit comité, et à priori, il n’y a pas l’air d’avoir de “cas social”.

Quitter la ville s’avère compliqué avec les bouchons matinaux. Petit à petit les bâtiments s’amenuisent, la circulation se fluidifie, les paysages urbains laissent place à de grandes étendues vertes. Les longs bouts droits cèdent la place à de petites routes de montagne. Le guide se veut bienveillant en nous prévenant à l’avance et annonçons les « gros » virages. Pour nous, c’est peanuts. Nous avons vécu bien pire.

Il nous faut 2h30 pour atteindre le château de Peles. Ce dernier se trouve au nord-ouest de la ville de Sinaia dans la region de Valachie. Nous nous trouvons en plein cœur de la nature à environ 800 mètres d’altitude. L’air est frais, la verdure est luxuriante et le soleil illumine les sapins. Un paysage digne de la Suisse. Lorsque mes yeux se posent sur l’architecture de l’immense demeure, je n’ai aucun doute sur l’endroit où je me trouve.

La construction du château a eu lieu de 1873 à 1883. La durée des travaux s’explique par plusieurs interruptions, notamment pour la guerre d’indépendance de Roumanie. Il a été édifié à la demande du prince Charles de Hohenzollern-Sigmaringen, qui deviendra le roi Carol 1er de Roumanie en 1881. À côté du château, est conçu une centrale électrique faisant du château de Peles le premier d’Europe à disposer d’électricité. L’endroit est intégré aux circuits touristiques à la fin du régime communiste de Roumanie en décembre 1989.

Le guide nous explique qu’avec le Covid, les visites sont compliquées et il n’est normalement pas autorisé à faire une visite guidée à l’intérieur. Mais… il connaît le personnel du musée qui prétendra ne nous avoir jamais vu et en contrepartie, nous prétendrons n’avoir jamais eu de tour guidé. Une approche qui me plaît beaucoup !

Il faut payer un supplément pour avoir le droit de prendre des photos à l’intérieur. Le prix est abordable, mais le principe m’agace et je n’achète pas l’extension de billet. Il faut dire qu’il a de la gueule ce castle. Avec ses grandes pièces, ses hauts plafonds travaillés à la main, ses tableaux ou encore ses grands miroirs. Les deux salles qui me marquent le plus sont… *suspens*… la salle des armes et la bibliothèque.

Dans la salle des armes, il y a, sans surprises des armes absolument partout. Une collection impressionnante d’épée et de fusil. Il y a également une armure complète d’un chevalier sur son destrier, lui-même avec une armure complète. L’effet est garanti.

La bibliothèque est composée de deux étages, dont le niveau supérieur est une sorte de mezzanine (en plus classe). En bas se situe les étagères remplies de livre, tandis que le haut sert à se poser afin de profiter de son temps de lecture. Outre la disposition de la pièce, il y a les tapisseries, les tableaux, les lustres ou encore les baies vitrées. Bref, un endroit à faire baver le petit rat de bibliothèque que je suis. Et le plus ? Une des étagères est un trompe-l’œil et cache un passage secret.

Pour finir en beauté, nous nous promenons dans les jardins du château et dégustons un encas sur la terrasse du café. Notre joyeuse petite troupe se réunit au parking pour reprendre la route en direction de Brasov qui se trouve à une heure d’ici.

Nous passons de la région de Valachie à la fameuse région de Transylvanie. Notre guide ajoute sa touche d’humour en précisant que ses dents viennent de s’allonger, mais qu’il est gentil car il a bien mangé. Trêve de plaisanterie.

Brasov est une grande ville de 290 milles et un petit tas d’habitant. Elle est bordée par les Carpates, une chaîne de montagne qui abrite, entre autre, des ours. Brasov est connue pour ses fortifications datant de l’époque médiévale et son énorme église noire de style gothique. Ce qui me frappe le plus en traversant la ville, ce sont tous les logements sociaux datant du communisme. Un pays chargé d’histoire d’un temps que je peine à représenter.

Je souris en découvrant les lettres de la ville postées sur la montagne qui l’entoure. Comme une sorte d’Hollywood version roumaine. Notre guide se parque et nous fait visiter quelques architectures en se promenant dans les rues. Nous atteignons la place du Conseil, qui se trouve dans le centre historique, reconnaissable à ses pavés typiques. La place est plutôt grande. Elle est entourée de bâtiments colorés de style baroque. Au centre se trouve l’ancien hôtel de ville, aujourd’hui reconverti en musée d’histoire locale. La nature est proche avec les montagnes qui nous entourent. J’aime bien l’endroit, même s’il est difficile d’ignorer le délabrement de certains bâtiments, sans compter ceux qui sont tout bonnement abandonnés.

Le guide nous amène un poil à l’écart des attractions touristiques pour nous ranger au “Ceaun” un restaurant qui fait de la cuisine locale. Ici, pas de coca ou autres conneries industrielles. Limonade faite maison, bière locale ou vin. Nous faisons nos sensibles, et rechignons la bière. Ça sera limonade de sureau pour Aurélien et eau gazeuse pour moi. Le plat est un pur délice. Je choisis des ribs de porc avec une sauce à l’ail, du choux et des patates. Un plat de résistance bien consistant comme seul les pays de l’Est savent le faire. Je me force à laisser des restes, afin d’éviter d’être malade.

Le ventre plein, nous reprenons la route, environ trente minutes, en direction du château de Bran. Ce nom vous dit quelque chose ? Il est également surnommé : le château de Dracula. Nous y sommes.

Pour l’histoire… Le château de Bran a été construit entre 1377 et 1382 dans un but stratégique afin de surveiller la route commerciale principale entre la Valachie et la Transylvanie dans les gorges de Bran. En 1920, le conseil de Brasov offre symboliquement le château à la reine Marie. Le château subit une rénovation grâce à elle. Un troisième et quatrième étages sera ajoutés, un ascenseur également, ce qui permettra un accès facilité entre les jardins et le château. En 1932, elle fait construire une turbine électrique qui illuminera le château, ainsi que les villages alentours : Bran, Simon et Moieciu. La reine Marie laissera ensuite l’imposante demeure à la princesse Ileana.

En 1897, l’écrivain irlandais Bram Stoker invente le personnage très célèbre de Dracula, un comte immortel, vivant dans un château de Transylvanie, assoiffé de sang. Aujourd’hui encore, ce personnage a inspiré un bon nombre de livre, film et histoires en tout genre.

Ce personnage n’est pas sorti de nul part. Bram Stoker s’est inspiré de l’illustre Vlad Tepes, également appelé Vlad l’Empaleur. Ce dernier est né en 1431 et est décédé en 1476. Pour se remettre dans le contexte de l’époque, la Valachie était une principauté qui résistait tant bien que mal à la pression ottomane déjà omniprésente. Partagée entre guerre et soumission, la Valachie entretenait une relation particulière avec le Sultan ottoman. Deux familles se disputaient le trône : Basarab-Dãnescu et Basarab-Draculescu. Les Draculescu négociaient la paix avec les Turcs, tandis que les Dãnescu appelaient leurs copains Hongrois afin de se séparer définitivement de ce maudit Sultan.

En 1447, le père de Vlad, Vlad II Dracul (ils ont été super original pour le prénom de leur fils, ce qui ne prête absoluement pas à confusion), conclua une trêve avec les Ottomans. Pause, je rembobine. Dracul, ça ne vous rappelle pas quelque chose ? Et pourquoi Dracul ? En roumain médiéval, cela signifie « le dragon ». Mais encore, pourquoi le dragon \240? Vlad père faisait parti de l’Ordre du Dragon, qui est un ordre de chevalerie créé en 1408. À quoi ça sert ? On ne sait pas trop, on s’en fiche, mais ça fait quand même sacrément classe. Et tout part de là pour l’origine de « Dracula».

Bref, la trêve ne faisait visiblement pas que des heureux, et Vlad père sera jugé en traître et tué avec son premier fils (plus on est de fou, plus on rit). Jean Hunyadi, responsable de la mort de Dracul, par son acte, évinça la famille Draculesti… du moins pour le moment.

Vlad junior avait tout juste onze ans lorsqu’il fut capturé et pris en otage par le Sultan de l’empire Ottoman. Sa séquestration durera de 1442 à 1448. Rien que six années pour réfléchir, et avoir tout le loisir de préparer sa vengeance contre la famille Danesti. Une aubaine pour le jeune Dracul.

En 1453, parce que la vengeance est un plat qui se mange froid, Vlad profita de l’absence de Jean Hunyadi au front, pour reprendre le trône de Valachie. Son règne durera six années. Une série de mauvaise décision, une pointe d’ego surdimensionné, et une envie de conquérir toujours plus, Vlad se fit beaucoup d’ennemi, notamment du côté Ottoman, et se fait emprisonner (encore !) durant douze années (cette fois ils ne déconnent pas) à Buda en Hongrie. En 1476, Vlad fut à nouveau élu prince de Valachie. Il ne profitera pas longtemps de son troisième règne, puisqu’il sera tué fin décembre. Les circonstances autour de sa mort sont aussi floues que celles de sa naissance. Ce qui est sûr c’est que le prince sera décapité et sa tête envoyé au Sultan qui l’expose tel un trophée sur un pieu.

Pour terminer, les récits qui parlent de la torture qu’aurait fait Vlad à ses ennemis n’ont pas été réellement démontrés. Il semblerait qu’en effet, c’était un prince valaque peu commode avec des méthodes peu orthodoxes qui lui auraient valu le titre “d’Empaleur”. Entre fiction et réalité, les faits ne seront sans doute jamais clairs.

Bon, je crois que je me suis largement emballée sur ces récits qui me passionnent. (Si vous avez besoin d’une histoire avec des commentaires tous plus pertinents les uns que les autres, appelez-moi.)

Bref, pour en revenir à nos châteaux, nous nous trouvons justement devant celui de Bran en ce milieu d’après-midi. Bien que l’extérieur soit séduisant, l’intérieur ne casse pas trois pattes à un canard. Et notre guide nous avait prévenu. Beaucoup de personne sont déçus après la visite de cette forteresse aux milles et une histoires.

L’intérieur n’a rien de folichon. Un vieux plancher qui grince sous nos pas, des murs blancs sans aucune originalité, des pièces aux plafonds bas, voir trop bas, et des escaliers et couloirs étroits, trop étroits. Autant le premier château ferait frémir et rêver n’importe quelle personne aimant les contes de fés et les histoires de princes et princesses, autant celui-ci ne fait aucun effet. Avant la réalisation du projet, ils auraient pu lire « La construction de château pour les nuls » ou « des tutos sur YouTube » comme dirait ma sœur. On dira qu’en 1300 et des grosses poussières, ça ne devait pas être d’actualité. Même la boutique souvenir est nul, et ça, ça finit de plier la visite. Tout en haut se trouve quelques salles avec des projections de fantômes, personnages légendaires et un vampire avec quelques goussses d’ail. Merci, on s’y croit tout de suite plus. La visite est plutôt expéditive, et nous rejoignons le reste du groupe afin de quitter la Transylvanie.

Nous arrivons à Bucarest à 20h00, après 3h00 de route. J’ai passé mon temps à lire et écrire, pour changer. La fatigue s’abat sur moi comme le maillet d’un juge sur son socle. Avec la climatisation dans la voiture une bonne partie de la journée, je sens que ma gorge me dérange. Nous faisons un saut par l’hôtel puis ressortons. Nous arpentons les ruelles roumaines du centre historique. L’endroit est particulièrement animé en ce mercredi 21h00. Les hauts-parleurs crachent de la musique si fort qu’on ne s’entend plus. Des femmes, portant des tenues laissant peu de place à l’imagination, se dandinent sur les bars aux rythmes des basses. Il y a tellement de restaurants que le choix est cornélien. Nous nous abattons, avec le sourire aux lèvres, sur le “iDracula”. Autant finir la journée en beauté. Le décor est quelque peu recherché et nous commandons un menu pour deux nommé “Vlad et Karina”. Le repas est copieux et délicieux.

Nous poursuivons la soirée en faisant quelques bars et terminons dans la même ruelle que la veille à danser jusqu’à 2h00.




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Strada Doamnei 17, BucureΘ™ti 030167, Roumanie

Ce matin, nous profitons de dormir jusqu’à 10h00 au vu du manque de sommeil de ces derniers jours. En me levant, je peaufine une dernière fois mon pavé de la veille.

Nous nous rendons en métro à côté du palais du parlement. C’est le deuxième monument administratif le plus grand du monde après le Pentagone. Autant dire que ça en jette.

En 1900, Bucarest était nommé “le petit Paris”. Aujourd’hui, on reconnaît encore certains bâtiments dans le style de la Renaissance Française. Ce qui a valu ce surnom à la capitale roumaine c’est également son atmosphère et la langue française qui était couramment parlé.

Le tableau se noircit par la suite avec l’arrivée du communisme où le surnom de “petit Paris” a rapidement disparu. Le palais du parlement se trouve dans l’ancien quartier d’Uranus. A l’époque, avant les guerres mondiales, c’était un quartier historique, aux ruelles pavées, remplies de vieilles maisons roumaines qui apportaient un style bohème. Les habitants de ce quartier faisaient partis de la bourgeoisie de la ville.

Le 4 mars 1977, Bucarest subit un séisme de 7,2 sur l’échelle de Richter. En 52 secondes, le tremblement a ravagé un bon nombre de bâtiments et immeubles faisant 1400 morts et 11’300 victimes. Après cette tragédie, Ceausescu, qui était à la tête du pays en étant le secrétaire général du Parti Communiste, a donné l’ordre de construire un nouveau centre civique socialiste. Le quartier historique d’Uranus a été rasé, et a vu naître plusieurs bâtiments communistes tous plus sombres les uns que les autres.

Aujourd’hui, le paysage est impressionnant. Entre modernité et vêtusté, entre passé et présent, le contraste est grand. Tout s’est construit autour de ses bâtiments qui dépérissent un peu plus au fil des ans. A noté qu’en 2017, soit quarante ans après le séisme, la capitale roumaine compte encore 700 immeubles jugés instables. Seulement 70 immeubles ont été consolidé depuis 1977. 317 bâtiments sont jugés à haut risque où résident environ 8000 personnes. La capitale de Roumanie est celle qui a le risque le plus élevé d’activité sismique en Europe. La population vit avec la peur d’une catastrophe nouvelle. Les experts chiffrent à plus de 8000 décès si un tremblement de terre de magnitude supérieur à 6 sévissait dans la région. Bucarest est l’un des pays les plus pauvres de l’UE. A ça, se rajoute des conflits post-communiste, une administration au ralenti, des affaires de corruption et de multiples querelles politiques. Résultat rien ne bouge. La population est activement formée, et certains habitants d’immeuble branlants ont reçu des kits de survie en cas de séisme. Disons qu’une fois qu’on se retrouve sous des tonnes de décombres, il n’y a plus besoin de grand chose… Il existe même une carte signalant les bâtiments à risque (http://seismic-alert.ro/). Les points allant du rouge au orange sont partout à Bucarest.

Bref, nous traversons le quartier avec la circulation oppressante typique d’une grande ville. Nous trouvons un centre commercial et décidons d’y faire un tour. L’endroit est tellement glauque que nous partons rapidement. Dehors, la chaleur est écrasante. Nous prenons des trottinettes électriques et descendons au parc Tineretului. Il est immense avec ses 94 hectares. Une vrai bouffée d’oxygène. En plein cœur, nous arrivons presque à oublier que nous sommes dans une grande ville et les bruits de la circulation ne sont plus que des murmures. Nous faisons le tour du lac Tinertului. Il y a pleins de canards, oies et cygnes. Au milieu du lac, sur une branche se trouve… plusieurs tortues ! Improbable. Nous faisons finalement un stop à l’orée du parc afin de boire une bière sur une terrasse. Nous prenons notre temps. Il faut dire qu’avec la chaleur, c’est difficile de faire autre chose.

Nous rentrons finalement à l’hôtel en trottinettes, mode de transport que j’ai définitivement adopté à défaut du métro. C’est bien plus agréable, et je chéris le moment où la vitesse m’offre un semblant de vent qui vient soulever mes cheveux.

En ce début de soirée, nous repartons dans le centre historique et découvrons deux nouvelles ruelles que nous n’avions pas encore exploré. Notre curiosité nous pousse au « Fire Club », un bar qui se trouve dans une cour intérieure. L’endroit est sympathique pour démarrer l’apéro. En marchant dans les ruelles pavées, juste en levant les yeux, je constate qu’il y a un bon nombre de bâtiments abandonnés. Une statistique parle de 35% de bâtiments/logements abandonnés dans toute la Roumanie. Nous poursuivons dans une taverne qui sert des plats locaux et finissons sur les terrasses des bars animées jusqu’à 2h00.






Ce matin, pas question de traîner au lit. Nous avons rencard à 10h00 pour obtenir notre pass de retour à la maison. A quelques rues de l’hôtel se trouve un petit centre de dépistage pour le Covid-19 composé d’une secrétaire et une infirmière. Cela va faire la quatrième fois que je me fais tester, à chaque fois dans le cadre d’un voyage. Et sur les quatre fois, il n’y en a pas eu deux pareilles. Aujourd’hui, nous avons droit à la question : bouche ou nez ? Honnêtement, j’en préférerais aucun, mais ça ne fait pas parti de l’équation. Va s’y pour la bouche, ça changera. Selon l’infirmière, cette manière de faire est valide pour les tests antigéniques. Ça me parait étrange.

J’ai toujours ce moment de stess en imaginant que le résultat pourrait être positif. Une heure d’attente et nous obtenons les résultats négatifs par mail. Me voilà rassurée. Nous préparons nos valises et rendons la chambre.

Nous commençons la journée par se rendre au “Gardena Verona”. Un petit café perdu derrière une bibliothèque. L’endroit est surprenant. Calme, vert, cela donne envie d’y rester plus que le temps d’un thé. Nous n’avons pas le luxe de nous étaler aujourd’hui. La prochaine étape se trouve au parc Cismigiu. Nous nous y rendons en trottinette sans grande surprise. \240Au milieu du parc se trouve un restaurant italien, le “Monte Carlo”. Il est situé juste à côté de l’eau, ce qui donne un joli cadre pour le repas de midi. En réalité, nos pizzas laissent clairement à désirer en terme de qualité et de goût. J’en laisse plus que la moitié. Nous faisons encore un tour du parc avant partir. Nous croisons une horde de pigeon. Tout le secret réside dans le fait de passer au milieu de leur gang, sans les faire s’envoler. Ces piafs me foutent une de ces angoisses, sans déconner. Et mamie qui laisse une place pour que les volatiles s’installent à côté d’elle sur le banc… les gens sont bizarres.

Passé cet épisode, nous revenons du côté de la vieille ville pour y boire un dernier verre. Il est 15h00, et c’est l’heure pour nous de se diriger vers l’aéroport. Je dois dire que je ne suis pas mécontente de rentrer. Nous reprenons le taxi par soucis de facilité. L’aéroport est aussi glauque que le reste de la ville, et il n’y a pas grand chose à y faire. Nous sommes en avance et errons jusqu’à ce que l’avion veuille bien de nous. Le géant métallique se pose sur le tarmac genevois à 21h00, avec une bonne vingtaine de minutes de retard.

Conclusion : la Roumanie est un pays bien trop grand pour la réduire à son unique capital. Je pense que le pays en lui-même recèle de surprise et d’endroits magnifiques, ce dont nous avons eu un aperçu lors de notre promenade entre la Valachie et la Transylvanie. Quant à Bucarest… il ne faut pas s’attendre à être fasciné par une quelconque beauté urbaine. C’est un monde à part, avec une architecture qui abrite beaucoup d’histoire et cache son lot souffrance. Je pense qu’il est possible d’y trouver son intérêt si on se donne la peine de voir un peu plus loin que les bâtiments délabrés, les ruelles sordides ou encore les trottoirs en ruine. La vie nocturne est clairement quelque chose à vivre. La ville est remplie de boîte de nuit et de bar plutôt chouette, le tout pour un prix bien dérisoire.